Guinée: Alpha Condé droit dans le mur ?

PSX_20200103_180242Combien de morts faudra-t-il pour que Alpha Condé retrouve toute sa lucidité et mette fin à son funeste projet de briguer un troisième mandat? La Guinée va-t-elle sortir un jour du cycle des dérives autoritaires de ces dirigeants successifs qui visiblement n’ont aucun sens de patriotisme mais ne sont guidés que par des intérêts personnels et très égoïstes? Demain ne semble pas être la veille avec le règne répressif de Alpha Condé qui, au lieu de rassurer son peuple et l’opinion internationale, conduit, envers et contre tout et tous, son pays au chaos. Vingt-trois morts sont déjà enregistrés depuis le début des manifestations contre le projet de nouvelle Constitution. A cela, il faut ajouter, les destructions de biens publics et l’érection de barricades qui ralentissent ou bloquent carrément les activités dans la capitale Conakry et dans d’autres villes. L’avenir n’est guère à l’optimisme compte tenu du mot d’ordre du Front anti-nouvelle constitution (FNDC) et anti troisième mandat, à poursuivre les manifestations jusqu’au retrait du fameux et fâcheux projet de nouvelle constitution. Du reste, Human Rights Watch (HRW), dans son dernier rapport dénonce sans ambages une répression de plus en plus forte des libertés de réunion et d’expression en 2019. Et comme pour assurer une impunité de première classe aux auteurs de ce musellement du peuple, le gouvernement les couvre d’un parapluie légal qui empêche pratiquement toute poursuite contre les forces de l’ordre. Tant pis pour les blessés et les morts!

Evidemment, le pouvoir guinéen a contesté ce rapport de HRW. Mieux, il accuse l’opposition d’être à l’origine des dérives et durcit le ton face aux manifestations pourtant entreprises contre un président qui est en train de tomber dans le piège suicidaire du mandat sans fin. Certes, l’octogénaire Alpha Condé n’a pas affirmé qu’il irait au troisième mandat, mais son tour de passe-passe de la modification constitutionnelle, qui lui permettra même de remettre à zéro le compteur des mandats est trop grossier.  C’est dans cette logique que l’opposition et la société civile, refusant de se laisser embobiner, ne passent pas par quatre chemin pour rejeter en bloc, le principe du projet de la nouvelle constitution. L’ancien Premier ministre, Cellou Dalein Diallo, le chef de file de l’opposition et président de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG) et Sidya Touré de l’Union des forces républicaines (UFR), se sont d’ailleurs abstenus de cautionner ce complot contre la démocratie, en refusant de déposer les candidatures de leurs partis à la Commission électorale nationale indépendante (Céni) pour le prochaines législatives. C’est dire combien ces élections de février 2020, si elles sont tenues, risquent d’avoir un fort parfum d’illégitimité. Il faut rappeler que l’UFDG et l’UFR qui seront hors starting-blocks de la course électorale de février, sont la tête de proue de l’opposition, occupant 47 des 114 élus de l’actuelle Assemblée nationale. Et les résultats de la course donneront un parlement aux mains du Rassemblement du peuple de Guinée (RPG Arc-en-ciel), le parti au pouvoir. Mais la politique de la chaise vide étant rarement payante, surtout en Afrique où l’opinion est pratiquement absente, n’est-ce-pas ouvrir, très large, le boulevard pour la modification de la Constitution et donc au troisième mandat de Alpha Condé? Il est temps pour la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO), l’Union africaine (UA), Paris et toute la communauté internationale de ramener Alpha Condé à la raison, pour ne pas avoir une crise, une de plus, à gérer/

En tout cas, la Guinée risque de vivre encore des heures très chaudes et probablement sanglantes si la situation n’évolue pas vers cette paix souhaitée par un peuple guinéen qui n’aspire maintenant qu’au développement que ce pays nanti en richesses naturelles mérite. Pourvu que l’ancien opposant devenu président sorte de son amnésie et se rappelle que c’est le charmant jeu de l’alternance qui l’a amené au pouvoir. Où est donc le Alpha Condé, chantre de la démocratie qui a souffert le martyr sous les différents régimes politiques qui se sont succédé, de feu Sékou Touré à Dadis Camara, en passant par feu Lansana Conté? Pourtant, tous avions lutté pour qu’il recouvre la liberté alors qu’il était dans les serres de ses geôliers de l’époque!

Par Wakat Séra

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